XI . La cathédrale

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La cathédrale est l’église de l’évêque. C’est l’église-bâtiment où il a son siège officiel, sa cathèdre : d’où le nom d’église cathédrale. Cette église est donc destinée à symboliser l’unité de l’Eglise particulière, qui est la communauté diocésaine, dite aussi éparchie dans les Eglises d’Orient. Elle personnifie, elle matérialise, de façon visible pour tous, l’unité de l’Eglise particulière et locale. Les paroisses, ou autres communautés de bases, ne représentent que des cellules internes de ce grand corps. On sait que dans les premiers temps du christianisme, on ne trouvait qu’une paroisse par siège épiscopal. La paroisse composait donc la circonscription de l’évêque.

Il arrive parfois dans les pays de vieille chrétienté, en France notamment, que dans un même diocèse on trouve plusieurs églises qui portent le nom de cathédrale. C’est que, à une période quelconque de l’histoire, des titres épiscopaux ont été regroupés sur la tête d’un même titulaire. En France, le concordat de 1801 a supprimé de nombreux diocèses d’ancien régime. Mais les titres correspondant ont été maintenus, d’une manière assez artificielle parfois, il faut le reconnaître. Ainsi l’archevêque d’Avignon, par exemple, porte encore les titres d’évêque d’Apt, de Carpentras, de Cavaillon, d’Orange et de Vaison-la-Romaine. Dans chacune de ces villes on trouve donc une église cathédrale ; quelque fois même deux, comme à Vaison-la-Romaine : l’antique et la médiévale !

Il arrive aussi que certaines églises dont les titres ont été déchus, ou transférés, soient encore appelées cathédrales, dans le sens de : anciennes cathédrales. Citons la cathédrale de Maguelonne, près de Montpellier.

Certaines églises-cathédrales n’existent plus qu’à l’état de ruines, ou de vestiges historiques. Mais leurs titres sont encore portés par ceux qu’on appelle alors des évêques titulaires. On disait autrefois évêques « in partibus », sous-entendu : « infidelium », évêques dans les pays des infidèles.

L’édifice public appelé cathédrale a pour vocation d’accueillir en son enceinte les principales cérémonies liturgiques, ou les manifestations religieuses les plus importantes du diocèse : messes dominicales avec homélie de l’évêque, ordinations aux ordres mineurs, ordinations diaconales et presbytérales, voire épiscopales, bénédiction des saintes huiles le jeudi saint (messe chrismale), célébrations liturgiques du calendrier chrétien, et très spécialement la Semaine Sainte, sous la présidence de l’évêque. La cathédrale est vraiment le centre de l’Eglise particulière, ou diocésaine.

Cependant, si la cathédrale accueille, elle ne saurait enfermer. Car la substance de l’Eglise particulière, aussi bien que de l’Eglise universelle, déborde infiniment tout édifice de pierre ou d’autre matériau. Aucune des cérémonies qu’on a évoquées ci-dessus, qui ne puisse se développer ailleurs que dans ses flancs. Quand, à Rome, cathédrale ou basiliques sont trop exiguës pour accueillir les foules, le pontife romain célèbre en plein air. Tout évêque est identiquement libre à l’égard de sa cathédrale.

La fonction la plus canonique, en même temps que la plus théologique, que puisse assumer la cathédrale, est donc d’abriter officiellement le siège de l’évêque, de rendre tangible cette vérité théologique, et même de foi, que la hiérarchie instituée par les apôtres est une hiérarchie locale, liée à des sites géographiques déterminés, une hiérarchie stable et non pas une hiérarchie itinérante. Disposition étonnante, quand on y songe, puisque les apôtres se définissaient eux-mêmes comme des aventuriers, toujours sur les routes. (Cf. Rm 15,22-32 ; 2 Co 11,26).

En raison de sa place, non pas primordiale mais première, parmi tous les édifices du culte chrétien, la cathédrale a connu à travers les âges un développement architectural et artistique considérable. On peut dire qu’elle résume à elle seule toute l’histoire de la civilisation chrétienne, dans ce qu’elle a de plus visible. Chaque époque de ferveur chrétienne, et de même toute tradition chrétienne, a fait se lever une belle floraison de cathédrales, en général durables dans le temps, et par conséquent typiques d’un style ou d’une technique données. Que ce soit l’art basilical ancien, l’art roman, arménien, gothique, baroque et maintenant moderne… Beaucoup de chefs-d’œuvre subsistent qui témoignent parmi nous du génie et de la piété des peuples. Elevée principalement à la gloire de Dieu, mais aussi secondairement à la gloire du peuple chrétien, qui est l’Eglise visible pérégrinant sur cette terre, la cathédrale récapitule un patrimoine cultuel et culturel très riche. 

De chaque cathédrale dans son diocèse, parmi tous les autres édifices religieux, on pourrait dire ce qui est écrit sur le fronton de la basilique Saint-Jean de Latran à Rome : CAPUT ET MATER OMNIUM ECCLESIARUM. Elle est la tête et la mère de toutes les églises.   

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