Note 67

 

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L’Exode d’après la bible et les sources égyptiennes.

Sommaire :

1. Datation de l’Exode, d’après la Bible.  

2. Non, je m‘excuse.  

3. Chronologie absolue de la période patriarcale.  

4. Les dix plaies d’Egypte, d’après les sources égyptiennes.   

1. Datation de l’Exode, d’après la Bible.

Au premier livre des Rois, chapitre 6, verset 1, on lit : « En la quatre cent quatre-vingtième année après la sortie des Israélites du pays d’Egypte, en la quatrième année du règne de Salomon sur Israël, au mois de Ziv qui est le second mois, il bâtit le Temple de Yahvé. »

Ainsi donc Salomon commença la construction du Temple, qui devait durer sept ans (cf. 1 R 6,38), la quatrième année de son règne.

On estime que Salomon a régné de – 1017 à – 977, soit 40 ans. Cette date de – 977 nous est fournie par Ezéchiel (4,5-6) : 390 ans avant la chute de Jérusalem en – 587 (= -977 + 390). La quatrième année du règne de Salomon se situerait donc en – 1013. Et la sortie d’Egypte serait à placer 480 ans avant (-1013 - 480 =  - 1493), en  1493 avant notre ère.

Mais au sens strict la péninsule du Sinaï appartenait à l’Egypte puisqu’elle était située avant le ouadi d’Egypte, qui marquait sa frontière (cf. 2 R 24,7). La date de – 1493 indiquerait plutôt la prise de Jéricho et l’entrée définitive d’Israël en terre de Canaan.

Le passage de la mer Rouge, ou de la mer des Roseaux, serait donc à placer 40 ans auparavant, en – 1533. Cela nous reporte au XVI e siècle avant notre ère, à la période des Hyksos. Le pharaon de l’époque serait Séqenenrê Taa, mort après 11 ans de règne, apparemment de mort accidentelle, d’après l’état de sa momie. Et son fils aîné, le prince Iahmès Sapaïr, dont on possède la statue, serait mort avant lui à l’âge de 6 ans, objet d’un grand deuil familial. Selon la vraisemblance ce prince serait la victime de la  dixième plaie d’Egypte, telle qu’elle nous est décrite par le livre de l’Exode (12,29-34).

On est loin de la datation actuelle proposée par les exégètes, qui placent l’Exode au XIII e siècle avant notre ère, du temps de Ramsès II. Aucune trace archéologique, aucun indice historique, aucune donnée biblique, ne permettent de situer l’Exode au XIII e siècle (av. J.C.).

Quant à la thèse du professeur Anati, qui fixe l’Exode au XX e siècle avant notre ère, elle me paraît aberrante. Elle ne correspond en rien aux indications de la Bible. L’hypothèse, qu’un livre biblique aurait été perdu, entre le livre de Josué et le livre des Juges, semble fantaisiste.

La chronologie biblique, qu’on peut avancer, reste très cohérente. Résumons-là ainsi :

- 1533 : sortie d’Egypte, après la mort du Pharaon dans la mer Rouge, ou la mer des Roseaux.

- 1493 : après 40 années d’errance, sortie du Sinaï, prise de Jéricho, entrée en Canaan.

- 1193 : vœu de Jephté, 300 ans après l’entrée en Canaan (cf. Jg 11,26).

- 1097 : début du règne de Saül, qui dura 40 ans (cf. Ac 13,21 et Antiquités judaïques VI, 378).

- 1057 : début du règne de David, qui dura 40 ans (cf. 2 S 5,4).

- 1017 : début du règne de Salomon, qui dura 40 ans (cf. 1 R 11,42).

- 1013 : début de la construction du Temple, 480 ans après la prise de Jéricho et l’entrée en Canaan (cf. 1 R 6,1).

- 977 : mort de Salomon et schisme de Jéroboam.

- 587 : chute de Jérusalem, 390 ans après la mort de Salomon et le schisme de Jéroboam (cf. Ez 4,5-6).

J’ai posé vos objections à mon référent Gertoux. On va bien voir ce qu’il me répond.

Quelques remarques rapides d'un non spécialiste.

Certes Manéthon n'est pas toujours fiable mais il a le mérite d'exister. Il date du IIIe au IIe siècle av. J.C. C'est d'après lui qu'on divise l'histoire de l'Egypte ancienne en 30 dynasties.

Gertoux ne s'y fie pas entièrement puisqu'il date l'Exode d'un peu avant Ahmosis.

D'après Gertoux, en effet, c'est bien Kamosis successeur de Séquennenrê qui aurait atteint le premier Avaris et l'aurait nettoyé du reste des Hyksos. Mais il ne l'aurait fait qu'après l'Exode et le départ de la masse des Hyksos, et non pas avant.

Cette expédition s'assimilerait plus à une simple opération de police qu'à une campagne militaire.

C'est à partir de lui que les pharaons du Sud auraient commencé, de nouveau, à régner sur l'ensemble de l'Egypte : fin de la Seconde Période Intermédiaire.

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2. Non, je m’excuse.

 

Non. Que je vous le dise tout de suite, Gertoux refuse de répondre et renvoie à ses documents publiés sur son site, qui selon lui seraient complets. J'en rappelle l'adresse : Chronologies controversées

J'essaie de reprendre votre texte:

Pour le nom de la ville, p(y) signifie "ville". Pi-Ramses (écriture moderne) veut simplement dire "ville de Ramses". La Bible parle de la ville de "Ramses". Dur de ne pas faire le lien. Pi-Ramses, mais aussi Pithom sont des villes ramessides. Baal-Cephon est une ville plus tardive... Jusqu'à l'usage du terme Pharaon qui n'existe pas sous Taa II. Il est impossible de dater l'Exode par les noms des lieux et le texte, si l'on considère qu'il se passe au début du Nouvel Empire, contient des incohérences historiques.

Le texte biblique (Ex 1,11) ne dit pas, exactement, la ville de Ramsès mais bien: "C'est ainsi qu'il bâtit pour Pharaon les villes-entrepôts de Pitom et de Ramsès." Gertoux argumente : "L'Exode est généralement placée durant le règne du prestigieux Ramsès II. Ce choix repose uniquement sur l'homonymie de ce pharaon avec la ville du même nom. Cette assertion ne tient pas car l'homonymie n'est pas bonne. En effet, la ville s'appelle Ra'amsés (Exode 1,11) et non Pi-Ra'msés et ensuite rien ne prouve qu'il y ait eu un lien entre cette ville, qualifiée de ville-entrepôt selon le texte biblique et non de capitale, et le pharaon très connu Ramsès II. Redford écrit : La Raamsès de la Bible et la capitale Per-Ramsès, excepté le nom propre, semblent ne rien avoir en commun. En l'absence complète d'indications corroborantes, il est absolument essentiel d'être circonspect quant à assimiler les deux. En fait, le nom de Ra'amsés ne désigne pas un pharaon mais une ville entrepôt. Si le pharaon avait été Ramsès la lecture la plus logique aurait été : C'est ainsi qu'il bâtit pour Ramsès les villes entrepôts de Pithom et celle portant son nom. De plus, la mention du nom d'un pharaon eût été un anachronisme, aurait constitué l'unique exception dans tout le Pentateuque, car le premier pharaon nommé dans le texte biblique n'apparaît qu'à partir du roi Salomon (Chéchanq Ier). Le seul renseignement historique sur la localisation de la ville de Ramsès est donné par Flavius Josèphe, qui fait commencer l'Exode par la ville de Létopolis (proche de Memphis) qui est sans lien notable avec Ramsès II. De même, le nom qui apparaît dans l'expression "pays de Ramsès" désignait une région particulière à l'époque de Joseph (soit deux siècles avant Moïse), aussi appelée "pays de Goshen" (Gn 45,10; 47,11), et non un pharaon précis. En fait, les termes égyptiens Ra "soleil" et mes "engendré de" sont tous les deux très anciens, puisque le nom de naissance des pharaons était toujours précédé de l'expression sa Ra "fils de Soleil" dans leur titulature. L'expression "pays de Ramsès" pouvait être comprise comme "pays du fils du Soleil". Vraisemblablement ce pays de Goshen devait correspondre au 14e nome de Basse Egypte, appelé "nome de l'Orient", car la ville de Tanis (et aussi celle d'Avaris) en faisait partie selon le texte biblique."

Quant à la division de Manéthon, elle est pratique car elle structure l'histoire mais on ne comprend pas grand chose à ces divisions (ni familiales, ni géographiques...) sans compter les erreurs, les rois en trop, les absents, les dynasties n'existant pas...

C'est possible. Mais la version de l'Exode donnée par Manéthon est reprise par d'autres auteurs classiques : Hécatée d'Abdère, Hérodote, Diodore de Sicile, Tacite, sans parler de Flavius Josèphe. La reine Hatchepsout confirme le récit de Manéthon, puisqu'elle écrit (vers - 1465) : "J'ai restauré ce qui était en ruine ; j'ai relevé ce qui était écroulé depuis l'époque où les Asiatiques étaient à Avaris, dans le Delta."

Les Hyksos étaient donc des Asiatiques.

En y réfléchissant, je me pose de nouvelles questions, (outre l'absence des armées de Taa II dans les régions concernées).

Mais oui : le Nord de l'Egypte, ou tout au moins le Delta, n'a été récupéré et occupé que par ses successeurs : Kamosis et Ahmosis. Pas étonnant si l'on ne trouve pas trace de ses armées dans le Nord. On ne trouve pas trace d'occupation dans le Nord, de son temps ; ce qui ne veut pas dire qu'il n'a pas pu lancer des expéditions épisodiques en direction du Nord, pas forcément glorieuses, et par conséquent n'ayant pas laissé de traces dans la littérature.

"L'analyse des stèles de Kamosis confirme plusieurs points du récit biblique : 1) Apopi, dernier roi Hyksos, est désormais appelé "prince de Palestine" et non plus "prince des pays étrangers", il avait donc quitté le Delta, 2) La cavalerie est utilisée comme fer de lance de l'armée égyptienne; 3) Apopi a causé un grand dommage à l'Egypte (Ahmosis, dans la stèle de la tempête, puis Hatshepsout dans le Speos Artémidos donneront une description très proche des "10 plaies d'Egypte", dont parle la Bible; 4) des Egyptiens ont soutenu Apopi (certains, comme le gouverneur nomarque Teti fils de Piopi, sont restés en Egypte et se sont rebellés contre la reprise en main de Kamosis, d'autres ont suivi Apopi dans sa fuite); 5) Apopi n' a jamais été inquiété dans sa fuite."

D'après Gertoux, le papyrus intitulé Admonitions d'Ipouer semble bien être la copie, faite au Moyen Empire, d'un document de la fin de la Seconde Période Intermédiaire, décrivant longuement ce que nous appelons les "dix plaies d'Egypte".

1) J'ai peut-être mal compris la thèse de M Gertoux mais pour lui, les hyksos sont les hébreux, qui furent poursuivis par Taa II. C'est cela ? Mais alors, qui avaient mis les hébreux en esclavage ?

- les rois du Nord, eux même Hyksos ?

- les rois du Sud, qui n'avaient aucun pouvoir sur le Nord ?

"Il semble que les rois des dynasties asiatiques avaient en fait une fonction de vice-roi (sur le nord de l'Egypte). Les dynasties égyptiennes étant celles des XIIIe et XVIIe dynasties (rois de Menphis/Lisht) à côté des dynasties étrangères : la XIVe (rois de Saïs), la XVe (rois d'Avaris), la XVIe (rois de Boubastis) et la dynastie éthiopienne (rois de Kerma) qui était devenue indépendante. Ces royaumes bien qu'autonomes restaient vassaux du roi d'Egypte. Le titre de prince des pays étrangers, désignant les rois Hyksos, indiquait donc qu'ils restaient des vassaux du pharaon qui était le seul à posséder le titre de roi d'Egypte. Apopi est l'unique Hyksos à être qualifié de roi (papyrus Rhind, daté de l'an 33 de son règne, et palette de Medinet el-Fayoum). L'inscription de cette palette pourrait aussi s'appliquer à Moise (Exode 18,13), car elle décrit le roi Apopi par l'expression très inhabituelle : "juge des nécessiteux (...) sans pareil dans le pays". Le titre "fils de Ré" attribué à Apopi (par le scribe égyptien) est une appellation standard, liée à sa fonction de pharaon, il n'implique pas de culte au dieu soleil."

« 2) Après la prise de Charouhen, voyant que les hébreux ne sortaient pas du Sinaï, qu'est-ce qui a fait que les égyptiens n'ont pas sillonné le Sinaï ? « 

Plusieurs raisons peuvent être invoquées. Peut-être les Egyptiens ne sentaient-ils pas en force pour attaquer les Hyksos-Hébreux, malgré tout très nombreux, réfugiés dans la péninsule du Sinaï ? Peut-être leur localisation exacte était-elle problématique ? Aujourd'hui encore elle fait l'objet de débats. Mais surtout peut-être les troupes égyptiennes devaient-elles rentrer au pays pour achever la pacification. L'unité de l'Egypte n'était pas acquise. Dans le Delta, des princes restaient indépendants, ou émancipés. Mais surtout, rappelez-vous, à cette époque-là l'Egypte n'était pas menacée seulement dans le Nord, mais encore dans le Sud, en la personne des Nubiens. De durs combats devront être menés, notamment par Kamosis, le successeur de Séquennenrê Taa.

La forteresse de Sharouhen, située près de Gaza, servait à contrôler la route commerciale vers la Palestine, et vers le reste de l'Asie. Elle pouvait être tenue facilement par une modeste garnison, inapte à entreprendre une expédition d'envergure dans la péninsule du Sinaï.

« 3) Acceptons l'hypothèse que l'exode ait lieu sous Taa II. Les hébreux rentrent alors vers 1493 en Terre Sainte, donc sous le règne de Thoutmosis I. Thoutmosis I est connu pour un raid jusqu'à l'Euphrate. Or pour une telle expédition, il faut une bonne intendance et que les territoires traversés soient sous domination égyptienne (probablement, pour le sud de la Terre Sainte), ou alliés aux égyptiens. Pourquoi ont-ils alors, laisser les hébreux s'installer en Terre Sainte ? »

Là encore vos arguments ne me paraissent pas décisifs. Quand les égyptiens partaient en campagne vers le Moyen-Orient, ils passaient soit par la mer, soit le long du littoral de la Palestine, tenu longtemps par les Philistins, et non pas dans l'arrière-pays accidenté, propice au refuge et à la défense. Au surplus quand Thoutmosis Ier (1484-1472) est parti vers l'Euphrate les Israélites ne devaient pas encore être organisés en royaume, et par conséquent leur menace sur les arrières des armées égyptiennes était faible.

Rappelez-vous. Quand le pharaon Néko, en - 609, a entrepris de partir en guerre contre l'Assyrie, il voulut laisser tranquille le roi Josias dans ses montagnes. C'est Josias qui a trouvé le moyen de l'attaquer et de se faire battre à plate couture à Megiddo.

Auparavant le pharaon Chéchanq Ier, la 5e année de Roboam (vers - 972) avait attaqué Jérusalem (cf. 1 R 14,25-26). Il se fit livrer tous les trésors du Temple, mais laissa subsister le petit pays de Juda. Il ne le détruisit pas, ni ne l'asservit.

« Pour Gentiloup : Je suis désolé mais comme je le dis plus haut, n'ait trouvé actuellement aucune thèse me paraissant plausible sur le sujet.
Au mieux, je peux vous citer le Pierre Grandet ("Pharaons du Nouvel Empire : une pensée stratégique")et le Christophe Barbotin, "le" spécialiste sur cette époque ("Ahmosis et le début de la XVIIIe dynastie") qui sans jamais parler de l'Exode, permettent de comprendre la difficulté à placer l'Exode dans le contexte historique du Nouvel Empire. »

Non, pas le contexte du nouvel Empire, mais juste avant, celui de la fin de la Seconde Période Intermédiaire. La fin de la domination des Hyksos.

Voilà. Je vous ai livré toute ma science (empruntée à d'autres). Si vous voulez des renseignements complémentaires, veuillez éditer la Chronologie israélite en deux parties (surtout la seconde) de Mr Gertoux. Je vous conseille (puis-je me permettre ?) de l'étudier posément et sans parti pris.

Il faut savoir que Mr Gertoux, en sa qualité de Témoin de Jéhovah (mais assez mal vu par ses pairs, ai-je cru comprendre), a tendance à faire une lecture fondamentaliste, c'est-à-dire littérale, des Ecritures saintes. Cela est assez mal vu aujourd’hui, même au Vatican.

Peut-être, après tout, se trompe-t-il ?

Mais sa chronologie synchronisée et comparée de toutes les civilisations anciennes reste fort impressionnante, remarquable de cohérence, et fondée sur des dates absolues. Il faut le reconnaître.

Tout le monde sait que les chronologies anciennes, non seulement de la Bible, mais de l'Egypte, de Babylone, de l'Assyrie, de la Perse, de Tyr, … sont encore fort problématiques, et discutées. Elles varient selon les auteurs. Aujourd'hui, on ne croit plus guère qu'en l'archéologie. Or l'archéologie ne peut donner que des dates très approximatives, au siècle près. Et encore !

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3. Chronologie absolue de la période patriarcale.

 

Bravo pour les considérations ci-dessus ! Et bravo pour les 144 ans donnés par saint Thomas d'Aquin ! (Je vais les confirmer dans quelques instants, à un an près.)

Mais je vous fais remarquer qu'il ne s'agit là que d'une chronologie relative, suffisante d’ailleurs pour répondre à la question subsidiaire posée par le Concours du Catéchisme : "Combien d'années la captivité du peuple hébreu en Egypte a-t-elle duré ?"

De l'arrivée d'Abraham en terre étrangère à la sortie d'Egypte 430 ans ont passés.

De l'arrivée de Jacob en Egypte jusqu'à l'Exode, il s'est écoulé 215 ans.

Et la captivité proprement dite, de la mort de Joseph à la sortie d'Egypte, a couru sur 145 années (je corrige légèrement saint Thomas d'Aquin : horresco referens !)

Mais quand ont donc commencé ces 430 ans, et ces 215 ans, et ces 145 ans ? En quelle même année, celle du passage de la mer Rouge, se sont-ils terminés ? On l'ignore.

La chronologie absolue de Gérard Gertoux va nous l'apprendre. Elle confirme et elle explicite entièrement la chronologie relative. On verra pourquoi, en fin d'article, elle est absolue, quels sont les points de repère qu’elle prend dans l'histoire universelle (et pas seulement biblique.)

Exposons-la d’abord :

- 2038: Naissance d'Abraham à Ur en Chaldée.

- 1963: Arrivée d'Abraham en Canaan à l'âge de 75 ans (Gn 12,4-5) et début des 430 ans de résidence en terre étrangère (Ex 12,40-41).

- 1938: Abraham a 100 ans (Gn 21,5), naissance d'Isaac l'ancêtre du peuple d'Israël et début d'une période de 450 ans (Ac 13,17-20), le fils d'Agar est âgé de 14 ans (Gn 16,16).

- 1933: Isaac sevré à 5 ans, période de 400 ans d'affliction (Gn 15,13) débutant avec les persécutions sur Isaac (Gn 21,8-9) par le fils d'Agar et se terminant à la sortie d'Egypte, la fin de la servitude (Ga 4,25-29).

- 1878: Naissance de Jacob quand Isaac a 60 ans (Gn 25,26).

- 1788 : Naissance de Joseph dans la 91e année de Jacob puisque ce dernier a 130 ans quand Joseph a 39 ans (= 30 ans + 7 ans d’abondance + 2 ans de famine) (Gn 41, 46.47.53.54 ; 45, 11 ; 47,9).

- 1748 : Arrivée des israélites (Jacob et sa famille) en Egypte dans la 40e année de Joseph (Gn 45,11 ; 46, 5-7), début du séjour de 215 ans (correspondant à la période de présence des Hyksos en Egypte, de - 1748 à – 1533).

- 1678 : Mort de Joseph à l’âge de 110 ans. Des chefs israélites sont établis par Joseph, puis par les pharaons, et administrent le pays de Goshèn (Gn 47,6 ; Ex 5,14) pendant 145 ans (règne des princes Hyksos). Les 40 dernières années de cette période sont attribuées au pharaon Hyksos Apopi (peut-être Moïse).

- 1573 : Début du règne d’Apopi, peut-être Moïse. Il fut le dernier ‘Grand personnage en Egypte’, car bien que ‘fils de pharaon’ 40 ans durant, il fut aussi banni pendant 40 ans avant de revenir en Egypte (Ex 2,15 ; 11,3 ; He 11,24 ; Ac 7,21-23, 29-36 ; Dt 34,7).

- 1533 : Sortie d’Egypte juste après la mort du pharaon (Séqenenrê Taa) et début des 40 ans d’errance dans le désert du Sinaï avant l’entrée en Canaan (Ex 16,35).

- 1493 : Sortie du Sinaï, mort de Moïse à 120 ans, prise de Jéricho, entrée en Canaan, début d'une période de pacification de 5 ans (Dt 34, 1-7, Jo 14,7.10).

- 1488 : Fin de la période de pacification, qui marque le début des jubilés (tous les 50 ans). Fin d'une période de 450 ans (Ac 13,17-20).

- 1013 : Début de la construction du Temple de Jérusalem, en la 4e année du règne de Salomon, 480 ans après l’entrée en Canaan et la prise de Jéricho, correspondant à la sortie définitive d’Egypte (1 R 6,1), car la Péninsule du Sinaï appartenait à l’Egypte.

Je cite, quasi in extenso, le commentaire de Gertoux : il vaut son pesant d’or, car il recoupe intégralement les propos de messieurs XA et Thomas d’Aquin : « La période de 430 ans est controversée, car on lit : ‘Et la résidence des fils d’Israël, qui avaient habité en Egypte, fut de quatre cent trente ans’ (Ex 12,40), ce qui pourrait impliquer un séjour de 430 ans en Egypte. Or cette lecture possible est contredite par le contexte. Les traducteurs juifs de la Septante, conscients de cette ambiguïté, ont préféré ajouter une incise pour prévenir tout quiproquo : ‘Le séjour que les fils d’Israël firent en Egypte (et dans le pays de Canaan) fut de quatre cent trente ans’. Cette incise, que l’on retrouve aussi dans le Pentateuque samaritain, est conforme au contexte indiquant que cette période de 430 ans représente la durée totale du séjour des fils d’Israël en dehors de l’alliance mosaïque (Ga 3,17). Cette période comporte deux parties : la première qui commence en Canaan par l’alliance abrahamique suivie rapidement par les brimades d’Esaü sur Isaac (Gn 21,9) et qui s’achève par la sortie de Jacob en Egypte, et une deuxième période débutant par cette servitude en Egypte et se terminant par l’Exode sous la direction de [monsieur] Moïse [Apopi ?]. Le verset incriminé devrait donc se lire : ‘Et la résidence des fils d’Israël, qui avaient habité en Egypte (215 ans), fut de 430 ans’. Cette considération chronologique était connue, puisque Flavius Josèphe (A.J. II, 318) la mentionne dans ses ouvrages [avant XA !]. La chronologie israélite fixe donc précisément la date de la sortie d’Egypte en – 1533 (cette date est celle qui était initialement prévue, car la sortie définitive d’Egypte eut lieu en – 1493, après les 40 ans d’errance dans le Sinaï. »

« Les synchronismes [permettant une datation absolue] dans la période patriarcale sont les suivants : 1) mort en – 1533 [d’après la chronologie égyptienne synchronisée] du pharaon [en l’espèce Séqenenrê Ta (1544-1533)] luttant contre les Hyksos, 2) début en – 1748 [toujours d’après la chronologie égyptienne synchronisée] de la dynastie hyksos d’une durée de 105 ans (108 ans selon le canon de Turin), et 3) guerre [d’Abraham, cf. Gn 14,1-16 ] avec Kutir-lagamar [Kedor-Laomer], un roi d’Elam, datée en – 1955 [grâce à de nombreuses correspondances onomastiques et politiques]. »

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4. Les Dix plaies d’Egypte, et l’Exode, d’après les sources égyptiennes.

La chronologie israélite synchronisée, de Gérard Gertoux, que nous avons déjà exposée dans deux posts précédents, intitulés :

La datation de l’Exode d’après la Bible,

http://www.leforumcatholique.org/message.php?num=567591

et

Chronologie absolue,

http://www.leforumcatholique.org/message.php?num=568039

fixe en – 1533, au XVIe siècle avant notre ère donc, la date de la sortie d’Egypte, ou franchissement de la mer Rouge ; ou mer des Roseaux. Cette date est établie ne varietur, très solidement, très cohéremment. Elle ne peut être reculée ni avancée d’une seule année.

Elle coïncide exactement avec la date de la mort du pharaon Séqenenrê Taa, qui serait donc le pharaon de l’Exode, anonyme dans la Bible, et à l’avènement de Kamosis, les deux derniers souverains de la XVIIe dynastie et de la Seconde Période Intermédiaire.

Plus précisément même, le passage de la mer Rouge peut être fixé aux alentours du 9/10 mai – 1533. En effet les Israélites partirent de la ville de Ramsès le 15 Nisan (selon Nb 33,3),  pour arriver au désert de Sin le 15 du mois suivant (selon Ex 16,1). L’affrontement décisif et le passage de la mer au lieu dit Pi-Hahiroth (cf. Ex 14,9), à mi-chemin entre Ramsès et le désert de Sin, durent se produire le 1er jour du deuxième mois lunaire (soit le 10 mai).

Ce qui correspond justement à une éclipse totale de soleil, qui dura plus de 6 minutes, et qui fut visible vers 16H40 sur le nord de l’Egypte, ce 10 mai – 1533. Selon la tradition enregistrée par l’historien juif Flavius Josèphe, cette éclipse dut être couplée avec un très violent orage qui sévit sur la région : « Quand toute l’armée des Egyptiens fut engagée, la mer reflua sur eux ; elle assaillit de tous côtés les Egyptiens de flots violents, attisés par les vents ; des pluies tombèrent du ciel à torrents ; le tonnerre éclata en coups secs, accompagnant de gros éclairs, la foudre s’abattit. En bref, aucune des forces destructrices par lesquelles la colère de Dieu frappe les hommes ne manqua de se déchaîner alors ; en outre une nuit épaisse les saisit. Tous périrent ainsi. » (Antiquités juives, II, 344).

Les sources égyptiennes ont gardé trace des Dix plaies d’Egypte, qui ont précédé l’Exode, de l’Exode elle-même, ainsi que de la fuite des Hyksos. Mais naturellement, elles les ont narrées de leur point de vue, exécrant la mémoire des Hyksos, surtout après leur départ, et la reconquête facile des lieux qu’ils occupaient. La mort dramatique du pharaon Séqenenrê Taa n’est pas relatée dans les documents égyptiens, car elle ne dut pas être très glorieuse pour les autochtones ; mais elle se déduit de l’état de sa momie, qui porte les marques évidentes d’une mort violente.

1). Les imprécations de Séqenenrê Taa contre Apopi.

De son vivant, le pharaon Séqenenrê Taa proférait les reproches suivants à l’adresse du prince hyksos, Apopi : « Le roi Apopi (…) fit de Soutekh son maître, et il ne servit aucun des dieux qui étaient dans le pays tout entier, excepté Soutekh. Il lui construisit un temple en travail bon et éternel, à côté de la demeure du roi Apopi (…) et il apparaissait à la pointe du jour pour offrir quotidiennement des sacrifices à Soutekh (…) Apopi, le prince du Retenou (…) ton projet a échoué, misérable Asiatique (…) Je brûlerai entièrement leurs places (…) à cause du dommage qu’ils firent à l’Egypte, ceux qui acceptèrent de servir les Asiatiques, après qu’ils aient abandonné l’Egypte leur maîtresse. » (J. B. Pritchard, Ancient Near Eastern Texts, Princeton 1969.) 

Il l’accusait de pratiquer un culte monothéiste. Il le traitait d’Asiatique et donc d’étranger. Il lui reprochait ses liens avec la Syro-Palestine : le Retenou.

2). La « Stèle de la tempête », du pharaon Ahmosis.

La Stèle de la tempête, érigée par Ahmosis, le premier pharaon de la XVIIIe dynastie, évoque la période catastrophique qui l’avait précédé, celle de l’expulsion des Hyksos : elle fait penser aux Dix plaies d’Egypte.

«  Quand les dieux firent venir du ciel une tempête de pluie, avec obscurité dans la région occidentale et le ciel se couvrit sans arrêt, plus bruyant que le son des sujets, plus fort que (…) Ensuite chaque maison et chaque habitation qu’ils atteignirent périrent et ceux en elle moururent, leurs corps flottant sur l’eau comme des esquifs de papyrus, même dans les portes et les appartements privés (…) pendant qu’aucune torche ne pouvait illuminer les Deux Terres (…) Combien ceci était plus grand que la manifestation du grand dieu, que les plans des grands dieux (…) commander d’affermir les temples qui étaient tombés en ruine dans tout le pays, pour faire fonctionner les monuments des dieux, pour ériger leurs murs d’enceinte (…) pour doubler les revenus des fonctionnaires, pour remettre le pays comme dans sa situation d’origine. »

Les égyptologues ont pensé à une évocation de l’éruption du volcan Santorin. Mais celle-ci s’était produite environ un siècle plus tôt. Sans l’explication biblique, la tempête d’Ahmosis reste une énigme pour les historiens.

3). Les Admonitions d’Ipouer.

L’écriture peu soignée de ce très long texte le date de la XIXe dynastie, soit vers – 1300, mais il semble être une copie ramesside d’un document de la fin de la Deuxième Période Intermédiaire, vers la fin de la période Hyksos marquée notamment par des troubles graves lorsque les asiatiques étaient dans le Delta. Force est donc de constater que le rapprochement s’impose entre les Admonitions d’Ipouer, la Stèle de la tempête d’Ahmosis et l’Exode biblique. Certains événements inhabituels de ces trois descriptions se retrouvent à l’identique. Il semble que les exhortations d’Ipouer s’adressent à un jeune pharaon, qui serait Ahmosis vers la fin de la régence de sa mère, et qui s’apprêtait à gouverner par lui-même.

« La pestilence est à travers le pays, le sang est en tout lieu (…) Vraiment le fleuve est du sang ! Pourtant, on en boit, quand on en est écarté en tant qu’homme, on a soif d’eau. (Adm. 2, 5.6.10).

« La terre ne s’illumine pas à cause de cela (…) Le prêtre pur est assis derrière les murs des ateliers contenant les statues des Faucons et des vautours et passe le temps sans lumière. » (Adm. 9,11.14).

« Vraiment les portes, les colonnes, les cloisons brûlent, mais l’enceinte du palais de Pharaon, qu’il soit en vie, épanoui et en santé, est stable et durable. » (Adm. 2,10.11).

« Vraiment les animaux, leurs cœurs pleurent ; le bétail déplore l’état du pays. » (Adm. 5,5.6).

« Vraiment les arbres sont abattus, leurs branches sont dénudées (…) Vraiment, on mange de l’herbe que l’on ingère avec de l’eau, car on ne trouve plus de graines, de plantes, de volailles, et l’on vole les fruits de la bouche des porcs. On ne dira plus : ‘C’est agréable pour toi, cela, plus que pour moi’ à cause de la famine. Vraiment le blé périt sur chaque chemin. » (Adm. 4,14 ; 6,1-3).

« La mort ne manque pas, le linceul gémit, car personne ne s’approche de lui. Vraiment des milliers de morts sont ensevelis dans le Fleuve, le flot est leur sépulcre. Ce qui advient en fait : la place de la purification est le flot du Fleuve (…) Vraiment les hommes et les femmes conscients sont rares. On ne cesse de jeter à terre son frère en tout lieu (…) Que faire, face à la situation présente ? Tout n’est que ruine ! Vraiment le rire s’est éteint, il n’existe plus. Les gémissements se répandent dans tout le pays, mêlés aux lamentations (…) Vraiment les enfants des nobles sont jetés contre les murs, les enfants sont arrachés au cou de leur mère pour être déposés sur une hauteur où ils mourront. Khnoum se lamente de sa faiblesse. Vraiment les cadavres qui se trouvaient dans la place pure sont abandonnés sur une butte. » (Adm. 2,6.7.13 ; 3,13.14 ; 4,3.4).

« Vraiment les pauvres sont devenus des riches, celui qui ne pouvait même pas fabriquer ses propres sandales possède à présent une grande quantité de biens (…) Les étrangers du dehors sont venus en Egypte (…) Vraiment l’or, le lapis-lazuli, l’argent, la turquoise, la cornaline, le porphyre vert, toutes pierres et minéraux précieux ornent le cou des servantes, alors que les nobles dames vénérables errent à travers le pays. Les maîtresses de maison clament : ‘nous voulons manger !’ » (Adm. 2,4.5 ; 3,1-3).

« La place des secrets a été trahie. Vraiment les formules magiques ont été révélées et circulent, leur force invocatrice brisée à cause des gens qui ont mémorisé cette pratique. » (Adm. 6,5-7).  

4.) Le naos 2248 du musée d’Ismaïlia.

Le naos 2248, trouvé à El-Arish, est une inscription du IIIe ou IIe siècle avant notre ère qui évoque l’époque des Hyksos sous forme légendaire ou mythologique. Mais plusieurs traits de cette légende semblent rappeler des souvenirs précis.

Je mets entre crochets, et en italique, les allusions probables aux personnages et aux événements. « Le mal tomba sur cette terre. Il y eut une grande révolution dans la résidence. Les rebelles [les Hyksos] portèrent le désordre aux habitants de la maison de Chou [le pharaon de l’Exode, Séqenenrê Taa] . Voici que Geb [le fils aîné du pharaon] vit sa mère qui l’aimait beaucoup [Ahhotep, épouse de Séqenenrê Taa]. Son cœur était négligent après elle. La terre (…) pour elle en grande affliction. La Majesté de Chou [le pharaon] vola vers le ciel avec ses compagnons {après sa mort]. Tefnout [Ahhotep, épouse de Séqenenrê] resta dans le lieu de son couronnement [son palais] à Memphis. Elle se rendit vers la demeure royale de Chou [le palais du pharaon] à l’heure de midi [ce 10 mai – 1533 donc]. La grande Ennéade des dieux se trouvait sur le monde [ ?] d’éternité qui est le chemin de son père Harakhté [père de Séqenenrê et d’Ahhotep, sa sœur épouse]. Alors la Majesté [de Chou] ? Voici qu’il la trouve en ce lieu appelé Pi-Kharoti [Pi-Hahirot, selon la Bible, Ex 14,9, lieu du passage de la mer Rouge] et voici qu’il l’enleva de vive force. Ce fut une grande révolution dans la résidence. C’était Chou [le pharaon Séqenenrê Taa] qui montait au ciel. Il n’y eut aucune sortie du palais pour une durée de 9 jours, et pendant ces 9 jours de révolution  ce fut une tempête [la même que celle racontée sur la Stèle de la tempête, d’Ahmosis] telle que ni les hommes, ni les dieux ne voyaient la face de leur prochain. La Majesté de Geb [le fils aîné du pharaon, mort peu avant son père] parut couronnée sur le trône de son père Chou [le pharaon auquel il aurait dû succéder], et tous les habitants de la résidence baisèrent la terre devant lui [il fit l’objet d’un culte, pendant des siècles]. Après 75 jours Geb [le fils aîné] se rendit dans le Delta [sur lequel il aurait dû régner] et Chou [son père] volait au ciel, par-dessus la terre, au-devant de son fils aîné à travers les montagnes [de l’Orient]. Il n’alla pas à On [Héliopolis] avec comme compagnons des voleurs de sceptre [les Hyksos], appelés les ‘cachés’, qui vivaient de ce que les dieux abominent [une religion monothéiste]  (…) Lorsque la Majesté de Ra-Harakhté [le père du pharaon] combattait avec les ennemis dans cette eau de Yat-Desoui [les rivages de la mer Rouge]  - les rebelles [les Hyksos] ne montrèrent aucune vaillance [ils fuyaient !] contre Sa Majesté [pharaon] – Sa Majesté [pharaon] prit contact avec Yat-Desoui [la mer Rouge], elle prit la forme d’un crocodile [elle disparut dans les flots] (…) Comme Sa Majesté [le roi] se trouvait [autrefois] à sa résidence de Ity-Taoui [près de Memphis] dans la terres des plantes henou [ ?], Sa Majesté [pharaon] avait envoyé une expédition pour lui amener les étrangers [les Hyksos] et les Asiatiques de leurs pays. Alors la Majesté de Geb |fils aîné de pharaon] dit auprès de la grande Ennéade des dieux qui était derrière lui : ‘Qu’a fait mon père Chou [Séqenenrê] depuis le commencement de son règne sur le trône de son père Atoum [seigneur d’Héliopolis du Sud] ?’ Cette Ennéade dit auprès de la Majesté de Geb [le fils aîné] : depuis que ton père Chou [Séqenenrê] était sur le trône de son père Atoum [seigneur d’Héliopolis], il battit [il aurait bien voulu !] tous les rebelles [les Hyksos] de son père Atoum [seigneur d’Héliopolis] en massacrant les enfants d’Apopis [le dragon, symbole d’Apopi, le chef des Hyksos] et il remit à la raison [en projet] tous les ennemis de son père Râ [le dieu soleil] et après que l’air fut refroidi, que les terres furent séchées, que les dieux et les humains eurent formé la suite d’Atoum seigneur d’On |Héliopolis] du Sud, il irrigua les villes, fondant les nomes, et il dressa les murailles de l’Egypte, construisant les temples dans les pays du Sud et du Nord [telle était l’ambition politique de Séqenenrê, mais qui ne sera réalisée que par son fils cadet Ahmosis, son successeur sur le trône, premier pharaon de la XVIIIe dynastie, après le bref règne de Kamosis]. »

On trouve donc dans cette allégorie d’étranges coïncidences avec le récit biblique, ou avec les circonstances politiques de la fin de la période Hyksos : Le pharaon résidait à Memphis, ou près de Memphis. Il sera à Thèbes, à partir de la XVIIIe dynastie. Les rebelles d’Apopis, le dragon, ou plutôt d’Apopi, le chef des Hyksos, attaquent l’Egypte à la tombée de la nuit, le mal tombe sur la terre, il y a une grande révolution dans la résidence, les rebelles apportent le désordre, la terre est en grande affliction, le pharaon se trouve en un lieu appelé Pi-Kharoti, qui ressemble au Pi-Hahirot biblique (Ex 14,9), lorsqu’il est enlevé de vive force, c’est une grande révolution dans la résidence, il monte au ciel (meurt), il n’y a aucune sortie du palais pendant 9 jours, et pendant ces 9 jours de révolution, c’est une tempête telle que ni les hommes ni les dieux ne voyaient la face de leur prochain. Le pharaon est mort en combattant les ennemis dans l’eau de Yat-Desoui et prend la forme d’un crocodile. Le pharaon suivant bat tous les rebelles en massacrant les enfants d’Apopis, le dragon, ou plutôt d’Apopi, le chef des Hyksos, et construit des temples dans le Sud et le Nord du pays.

5). La narration de Manéthon.

En réaction à la publication de la Bible, en grec, le prêtre égyptien Manéthon vers - 280 a donné une version de l’expulsion des Hyksos et de l’Exode des Hébreux, d’après des traditions puisées dans les archives de son pays,  assez romancée, mais qui n’est pas sans rappeler sur plusieurs points le récit biblique.

Manéthon, cité par Flavius Josèphe (Contre Apion I, 237-266), écrivait : « Les hommes enfermés dans les carrières souffraient depuis assez longtemps, lorsque le roi, supplié par eux de leur accorder un séjour et un abri, consentit à leur céder l’ancienne ville des Pasteurs [Hyksos], Avaris, alors abandonnée. Cette ville, d’après la tradition théologique, est consacrée depuis l’origine à Typhon [le dieu Seth]. Ils y allèrent et, faisant de ce lieu la base d’opération d’une révolte, ils prirent pour chef un prêtre d’Héliopolis nommé Osarseph [sans doute Aaouserré-Apopi] et lui jurèrent d’obéir à tous ses ordres. Il leur prescrivit pour première loi de ne point adorer de dieux [monothéisme], de ne s’abstenir de la chair d’aucun des animaux que la loi divine rend les plus sacrés en Egypte [condamnation de la zoolâtrie], de les immoler tous, de les consommer et de ne s’unir qu’à des hommes liés par le même serment. Après avoir édicté ces lois et un très grand nombre d’autres, en contradiction absolue avec les coutumes égyptiennes, il fit réparer par une multitude d’ouvriers les murailles de la ville et ordonna de se préparer à la guerre contre le roi Aménophis [ ?]. Lui-même s’associa quelques-uns des autres prêtres contaminés comme lui, envoya une ambassade vers les Pasteurs chassés par Tethmôsis [Ahmosis ?], dans la ville nommée Jérusalem [la Palestine ?], et, leur exposant sa situation et celle de ses compagnons outragés comme lui, il les invita à se joindre à eux pour marcher tous ensemble sur l’Egypte. Il leur promit de les conduire à Avaris, patrie de leurs ancêtres, et de fournir sans compter le nécessaire à leur multitude, puis de combattre pour eux, le moment venu, et de leur soumettrze facilement le pays. Les Pasteurs, au comble de joie, s’empressèrent de se mettre en marche tous ensemble au nombre de 200.000 hommes environ et peu après arrivèrent à Avaris. Le roi d’Egypte Aménophis, à la nouvelle de leur invasion, ne fut pas médiocrement troublé, car il se rappelait la prédiction d’Aménophis, fils de Paapis. Il réunit d’abord une multitude d’Egyptiens, et après avoir délibéré avec leurs chefs, il se fit amener les animaux sacrés les plus vénérés dans les temples et recommanda aux prêtres de chaque district de cacher le plus sûrement possible les statues des dieux. Quant à son fils Séthôs, nommé aussi Ramessès du nom de son grand-père Rampsès, et âgé de cinq ans, il le fit amener chez son ami. Lui-même passa (le Nil) avec les autres Egyptiens, au nombre de 300.000 guerriers bien exercés, et rencontra l’ennemi sans livrer pourtant bataille ; mais pensant qu’il ne fallait pas combattre les dieux, il rebroussa chemin vers Memphis, où il prit l’Apis et les autres animaux sacrés qu’il y avait fait venir, puis aussitôt, avec toute son armée et le peuple d’Egypte, il monta en Ethiopie ; car le roi d’Ethiopie lui était soumis par la reconnaissance. Celui-ci l’accueillit et entretint toute cette multitude à l’aide des produits du pays convenables à la nourriture des hommes, leur assigna des villes et des villages suffisants pour les treize ans d’exil imposés par le destin à Aménophis loin de son royaume, et n’en fit pas moins camper une armée éthiopienne aux frontières de l’Egypte pour protéger le roi Aménophis et les siens. Les choses se passaient ainsi en Ethiopie. Cependant les Solymites [ceux de Salem] firent une descente avec les Egyptiens impurs et traitèrent les habitants d’une façon si sacrilège et si cruelle que la domination des Pasteurs paraissait un âge d’or à ceux qui assistèrent alors à leurs impiétés. Car non seulement ils incendièrent villes et villages, et ne se contentèrent pas de piller les temples et de mutiler les statues des dieux, mais encore ils ne cessaient d’user des sanctuaires comme de cuisines pour rôtir les animaux sacrés qu’on adorait, et ils obligeaient les prêtres et les prophètes à les immoler et à les égorger, puis les dépouillaient et les jetaient dehors. On dit que le prêtre d’origine héliopolitaine qui leur donna une constitution et des lois, appelé Osarseph, du nom du dieu Osiris adoré à Héliopolis, en passant chez ce peuple changea de nom et prit celui de Moise. »

Flavius Josèphe, qui rapporte ce texte de Manéthon, l’a justement critiqué, car il contient beaucoup d’invraisemblances historiques. Toutefois Manéthon mettait en relation le départ des Hyksos avec Moïse conduisant l’Exode. Selon lui, les Juifs de Palestine étaient les descendants des anciens Hyksos chassés d’Egypte à cause de leur lèpre et le roi hyksos nommé Osarseph en Egypte était appelé Moïse en Palestine. Il souligne le monothéisme foncier de ce chef : « Il leur prescrivit pour première loi de ne point adorer de dieux. » C’est donc pour des motifs religieux que les Hyksos, d’origine asiatique, se sont heurtés aux égyptiens autochtones.

De nombreux historiens anciens confirment cette version des faits : Hécatée d’Abdère, Diodore de Sicile, Hérodote, Eupolème…

6) La momie de Séqenenrê Taa.

Aucun document ancien ne nous parle de la mort du pharaon Séqenenrê, qui n’a pas dû être très glorieuse, sauf, on l’a vu, des légendes qui racontent qu’à sa mort, il se serait transformé en crocodile pour s’élever dans les cieux, ce qui laisse entendre qu’il serait mort dans l’eau…

L’état de sa momie témoigne d’une mort très violente. Un rictus de colère semble encore se lire sur sa figure. Il a dû périr dans le feu de l’action. Certains disent cependant qu’il serait mort couché, ou même endormi. Un objet tranchant et très lourd lui est passé sur la joue gauche, lui entaillant profondément le visage. Il a reçu d’autres coups sur le sommet du crâne. Il n’est pas mort dans son lit, et dans son palais, victime d’un assassinat, car on a mis plusieurs jours avant d’embaumer son cadavre, qui était déjà dans un état de putréfaction avancée. Il n’est pas mort dans une échauffourée, sur le champ de bataille, car il se serait défendu. Or le reste de son corps ne porte aucune trace de blessures.

Il est évident qu’il est mort écrabouillé par son char, ou par d’autres chars, poursuivi par la vengeance divine, noyé dans les flots. Son corps n’a dû être découvert que plusieurs jours plus tard, parmi les débris de son armée. Il a fait l’objet d’une momification hâtive, avec les moyens de l’endroit. On n’a même pas pris la peine d’enlever les viscères. C’est au point que, plusieurs millénaires plus tard, quand les archéologues autopsieront sa momie, le liquide contenu dans son corps empuantira le laboratoire.   

7). La statue de Iahmès Sapaïr.

Selon le texte biblique, tous les premiers-nés d’Egypte moururent lors de la 10e et dernière plaie, ce qui dut constituer un drame pour le pharaon, s’il avait un fils aîné. L’égyptologue Vandersleyen écrit : « Séqenenrê eut un héritier, le  prince Iahmès. Las ! Il est mort à six ans et son père a suivi de près (…) Très rapidement son culte s’est formé [il durera jusqu’au début de la 21e dynastie] et il est le premier de la ‘grande famille’ royale de la fin de la 17e et du début de la 18e dynastie à avoir été l’objet d’un culte, avant Amenhotep Ier et Iahmès Néfertari (…) Les inscriptions de la statue révèlent que ce prince est le fils aîné de Séqenenrê Djéhouty-Aa (…) La statue est exceptionnelle à plusieurs points de vue. C’est une grande statue de 1,035 m de haut, ce qui est remarquable à un moment où il n’y a quasi aucune statue ! Elle témoigne d’un chagrin familial ; le prince est évidemment mort prématurément puisqu’il est regretté par sa mère et ses deux sœurs, et par le roi son père. C’est un cas unique dans toute l’histoire de l’Egypte pharaonique qu’un roi déclare sa paternité et s’adresse directement à son fils, en utilisant la deuxième personne. » (Iahmès Sapaïr, Paris 2005, Safran, pages 14-18.27).

Gertoux pense que Iahmès avait plutôt 10 ans (d’après la taille de son père : 1,65 m). L’enfant serait donc né en – 1543 : ce qui constituerait une coïncidence remarquable. En effet, tous les 243 ans les levers héliaques de Sirius et de Vénus coïncidaient, ce qui marquait une nouvelle ère : celle de la renaissance du phénix, ou grande année. Or cette coïncidence s’est produite exactement à la mi-juillet – 1543.

Pas étonnant que cet enfant ait fait l’objet d’un tel culte. Iahmès Sapaïr serait donc le fils aîné de pharaon, victime, selon la Bible, de la dixième plaie d’Egypte. (Ex 12,29).  

Il n’y a que Gertoux, avec sa lecture littérale obstinée de la Bible, et des autres littératures antiques, qui soit capable de nous donner de telles précisions. Nous indiquer, non seulement l’année, mais le mois, mais l’heure et même la minute (la minute décisive !) de l’Exode, il faut le faire : Le 10 mai de l’an – 1533 à 16 heures 40 minutes, rien de moins !

Nous donner la photo (de la momie) du pharaon concerné, il faut le faire. Avec son nom et la durée exacte de son règne. La photo (de la statue) du fils aîné de pharaon, victime de la dixième plaie d’Egypte ; tous personnages déjà connus, par ailleurs, dans l’histoire profane, il faut le faire. Mais on n’avait jamais pensé à faire le lien.

 De même le lieu exact du passage de la mer Rouge, pour lui ne fait aucun doute. Je le cite : «  Les Israélites suivent le chemin du désert (qui va de la capitale, Memphis, aux mines de Sérabit el-Khadim) et non le chemin des Philistins, appelé chemin d’Horus par les Egyptiens, qui longe la côte méditerranéenne, pour camper à Soukkhot, puis à Etham avant de finalement revenir à Pi-Hahiroth (Ex 13,17-14,2). Cette ville devait se situer au nord de la mer Rouge et selon la description de Josèphe pourrait être l’actuel djebel ‘Ataqa. Le pharaon meurt lors de la traversée de la mer Rouge (il s’agit en fait de l’ancienne mer des Roseaux au nord de la mer Rouge, car le texte grec traduit toujours l’expression hébraïque yam-souph par érythra thalassa, Ac 7,36 ; He 11,29), puis les Israélites atteignent Elim (actuel ouadi Gharandel) le 15 du mois suivant (Ex 16,1). Le trajet entre Memphis et Elim est de 600 kilomètres environ, cette distance peut être parcourue en 24 jours, ce qui correspond aux 30 jours indiqués dans le texte, en tenant compte de la durée des campements. La traversée actuelle entre le promontoire appelé Ras ‘Ataqa jusqu’à l’oasis d’Ayoun Mousa, sur la rive opposée, est d’environ 10 kilomètres ce qui impose une durée d’au moins 2 heures pour passer à pied d’une rive à l’autre. La profondeur maximale est de 15 mètres au milieu du trajet, ce qui est en accord avec la description biblique : ‘Les Israélites pénétrèrent à pied sec au milieu de la mer, et les eaux leur formaient une muraille à droite et à gauche.’ (Ex 14,22). Pour éviter l’explication miraculeuse, certains biblistes proposent une simple traversée de marécages, mais, dans ce cas, le chemin emprunté aurait été soit impraticable pour une vaste foule, soit sans danger pour les armées égyptiennes. »  

La méthode de Gérard Gertoux me paraît très saine dans son principe. Elle peut se résumer par cet aphorisme : en histoire, il n’y a pas d’erreur, sauf si elle est prouvée.

Ce qui l’amène à avoir une lecture littérale, non seulement de la Bible, mais encore, comme je l’ai dit, de toutes les littératures antiques, dans la mesure où elles sont compatibles entre elles, ce qui arrive plus souvent qu’on ne pense.

Un document unique pour un temps ou un épisode donnés : par exemple la Guerre des Gaules, de Jules César, est considéré a priori comme fiable, à moins de certitude d’erreur factuelle.   

Mais sa lecture s’appuie systématiquement sur des repères absolus, par exemple les éclipses, souvent mentionnées dans les sources antiques, et qui sont vérifiables par l’astronomie.

D’autre part, toutes les chronologies, biblique ou extrabibliques, sont rigoureusement synchronisées entre elles, mises en parallèles. Ce qui confère une grande sécurité.  

Il faut que ce soit un Témoin de Jéhovah qui le fasse ! Un catholique n’en serait pas capable ! Les progressistes, aujourd’hui les plus nombreux parmi nous, accueilleraient ces prospections bibliques avec des haussements d’épaule. Inutile même de les leur présenter. Quant aux catholiques dits tradi (tout au moins sur ce Forum), ils sont bien trop occupés à se chamailler pour des vétilles, pour accorder à ce genre de recherches plus qu’un simple coup d’œil distrait ! 

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