Béthanie (cf. Jn 1,28) doit se lire : Bétharaba
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Jean-Baptiste avait baptisé à Béthanie, au-delà du Jourdain (cf. Jn 1,28), donc en Pérée. L’évangéliste confirmait ce renseignement, d’au-delà du Jourdain, en Jn 10,40.
Mais cette Béthanie des bords du Jourdain étant par ailleurs totalement inconnue, Origène, suivi par Eusèbe de Césarée (onomasticon 58), proposait, sans doute avec raison, de corriger Béthanie en « Bétharaba », dans le texte de Jean (1,28).
Il est vrai que la fameuse carte de Madaba (mosaïque du VI e siècle) plaçait Bétharaba à l’ouest du Jourdain, ce qui peut paraître contradictoire avec les indications de Jean.
Mais on sait que les cartographes inscrivent les noms de localités, indifféremment, de l’un ou l’autre côté d’un fleuve. D’autre part, le lit même du Jourdain avait pu changer au cours des âges.
Après son baptême des mains de Jean, baptême reçu donc en Pérée, à l’est du Jourdain (cf. Jn 1,28 s), Jésus lui –même, au tout début de son ministère public, après la première Pâque à Jérusalem et la purification du Temple qu’il y avait opérée (selon Jean : 2,13-25), était revenu sur les bords du fleuve pour y baptiser lui aussi (cf. Jn 3,22), et du même coup recruter des disciples (cf. Jn 4,1). Mais il était resté en Judée, c’est-à-dire à l’ouest du Jourdain (cf. encore : Jn 3,22), dans la région de Jéricho.
Pendant ce même temps, Jean s’était déplacé, plus au nord semble-t-il, à Aenon près de Salim (cf. Jn 3,23) que l’on situe généralement près de Schythopolis, en Décapole.
On remarque que Jésus n’avait pas voulu du tout empiéter sur les « territoires » de Jean. Bien plus, dès que des discussions s’élevèrent entre disciples, comme il était fatal, sur la valeur respective des deux baptêmes, celui de Jésus et celui de son prédécesseur (ou précurseur) Jean (cf. Jn 3,25 --- 4,1), - à vrai dire, c’était un Juif qui était en cause, une tierce personne, probablement un Pharisien - Jésus quitta pour longtemps la Judée et retourna en Galilée. Désormais, dans les évangiles, on n’entendrait plus parler de ce baptême de Jésus, jusqu’après la Résurrection (cf. Mt 28,19).
Il n’empêche que ce baptême conféré par Jésus, ou plutôt en son nom par ses disciples (cf. Jn 4,2), était déjà un véritable baptême chrétien, puisqu’il avait pour effet d’agréger à la troupe des disciples de Jésus, et non à la troupe des disciples de Jean (cf. Jn 4,1).
Il paraîtrait d’ailleurs indécent de poser même la question : comment un baptême administré par Jésus, ou par ses apôtres sur son ordre, eût-il pu ne pas être déjà un véritable baptême chrétien, c’est-à-dire un baptême trinitaire.
Pour infirmer ce point de vue, on invoque le fait que l’Esprit Saint n’était pas encore descendu sur l’Eglise et que, par conséquent, le mystère trinitaire n’était pas encore entièrement révélé.
C’est oublier que la nomination et la révélation des Trois Personnes divines avaient déjà été accomplies publiquement, dès le propre baptême de Jésus dans le Jourdain, et ceci d’après le témoignage de Jean-Baptiste lui-même (cf. Mt 3,13-17 ; Mc 1,9-11 ; Lc 3,21-22 ; Jn 1,29-34 ; 3,27-36).
Que si la nomination des Trois Personnes divines était déjà accomplie publiquement, et leur existence révélée à l’humanité, dès lors le baptême pouvait, et même dirions-nous devait, être administré en leurs noms.
La descente de l’Esprit Saint sur les apôtres et sur l’Eglise, au jour de la Pentecôte (cf. Ac 2,1-13) n’avait fait que parfaire l’Eglise, qui existait déjà inchoativement, même dans certains de ses sacrements : le baptême trinitaire, donc, mais aussi le sacrement de l’eucharistie et le sacrement de l’ordre selon l’enseignement explicite du Concile de Trente. Le sacrement de pénitence, ou de rémission des péchés, fut lui-même institué avant la Pentecôte. (Cf. Jn 20,22-23).
Si donc la plupart des sacrements furent établis avant la Pentecôte, on ne voit pas, théologiquement, pourquoi le baptême chrétien n’aurait pu l’être. Souvenons-nous que, d’après la théologie la plus traditionnelle, le baptême est la porte d’entrée de tous les sacrements. Il convenait donc que les apôtres fussent d’abord baptisés, avant de recevoir le corps du Christ et d’être ordonnés ministres de l’Eglise.
Autre argument qui pourrait conforter notre opinion : le sacrement de l’ordre fut toujours considéré dans l’Eglise comme une effusion de l’Esprit, puisqu’il est transmis par une imposition des mains. Or c’est un fait qu’il fut créé avant le jour de la Pentecôte.
Jésus lui-même, au matin de sa résurrection, disait à ses apôtres : « Recevez l’Esprit Saint. » (Jn 20,22).
Il est d’ailleurs de foi traditionnelle de croire que tous les sacrements ont été institués par Jésus-Christ, au cours de sa vie publique, c’est-à-dire en fait avant son Ascension, avant son départ définitif de cette terre. Par conséquent le baptême trinitaire lui-même l’a été.