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15. Annonce de l’emprisonnement du Baptiste.

Luc 3, 19-20.

Cependant le tétrarque Hérode, qu’il blâmait au sujet d’Hérodiade, la femme de son frère, et pour tous les méfaits qu’il avait commis, en ajouta un nouveau à tous les autres : il fit enfermer Jean en prison.

Episode 15. Commentaire.

Luc seul annonce prématurément l’arrestation du Baptiste, en deux versets, dès le récit de sa prédication dans la vallée du Jourdain. Nous suivons cette annonce, même si, pour nous, elle ne se réalisera que plus tard, lors de l’épisode 28. D’après l’évangéliste Jean, Jésus a exercé tout un ministère, en Judée essentiellement, avant l’arrestation du Baptiste. Il faut en tenir compte. Et le retour en Galilée de Jésus, et sa prédication dans cette province, ne se feront qu’après l’arrestation du Précurseur (cf. Mc 1,14).

Les anciens Pères étaient très sensibles à ce phénomène. Déjà le Canon de Muratori (vers 170) écrivait : « Quoique chaque livre des évangiles enseigne autrement les premiers faits, la foi des croyants n’y fait aucune différence… ». Eusèbe de Césarée analyse longuement le fait. Il faudrait citer toute sa page qui nous importe ici : « Mais il manquait à leurs écrits [Matthieu, Marc et Luc] le seul récit des choses faites par le Christ dans les premiers temps et au début de sa prédication. Et ce motif est véritable. En effet, il est possible de voir que les trois premiers évangélistes ont écrit seulement ce qui a été fait par le Sauveur après l’arrestation et l’emprisonnement de Jean-Baptiste, durant une seule année et qu’ils l’ont indiqué au commencement de leurs récits. » (H.E. III, 24, 7-8). Il continue : « On dit donc que ce fut pour cela que l’apôtre Jean fut prié de transmettre dans son évangile le temps qui avait été passé sous silence par les évangélistes précédents et les actions faites par le Sauveur durant ce temps, c’est-à-dire avant l’emprisonnement du Baptiste. » (H.E. III, 24, 11).

A vrai dire on est assez embarrassé pour placer dans la chronologie relative (et a fortiori absolue) de la vie de Jésus la date exacte de l’arrestation du Baptiste. Saint Luc la relate par anticipation, en parlant de la prédication de Jean, avant même le baptême de Jésus (notre épisode actuel). Matthieu et Marc la rappellent en narrant la mort du Précurseur (notre épisode 75). L’historien Josèphe la raconte à propos d’une défaite d’Hérode Antipas, longtemps après. (Cf. Arthur Loth, page 539).

Loth lui-même place l’arrestation du Baptiste dans la seconde moitié de l’année 30, première année du ministère public de Jésus. En réalité c’est seulement après la deuxième fête de Jésus à Jérusalem, rapportée en Jn 5,1-47, qu’on est sûr que Jean était arrêté. En effet Jésus, à cette occasion, semble parler au passé de la prédication de Jean le Baptiste : « Celui-là [Jean-Baptiste] était la lampe qui brûle et qui luit, et vous avez voulu vous réjouir une heure à sa lumière. » (Jn 5, 35). Malheureusement Jean l’évangéliste ne nous annonce pas clairement quelle était cette seconde fête à Jérusalem. Elle reste anonyme. C’est là l’une des grandes incertitudes de la biographie de Jésus-Christ.

Gérard Gertoux, dans sa chronologie, tient que cette fête pourrait être celle de Nikanor ou Pourim, début mars de l’année 31, peu avant le 1er Nisan (début de l’année liturgique). Arthur Loth, avec plus de vraisemblance, mais sans certitude, penche pour la seconde Pâque du ministère public de Jésus, le 27 mars 31, un mardi. Il est vrai que cette hypothèse est corroborée par saint Irénée qui n’hésite pas à voir dans cette seconde fête, celle du miracle du « paralytique qui gisait au bord de la piscine depuis trente-huit ans », la seconde Pâque du Sauveur à Jérusalem. (Cf. Adv. Hae. II, 22, 3).

On peut conclure de cette discussion que Jean fut arrêté au début de l’année 31, deuxième de la vie publique du Sauveur. Il sera décapité, selon la chronologie de Gertoux, au début de l’année 32, donc après environ un an de détention. Ce qui semble correspondre à la vraisemblance historique.

C’est après cette Pâque de l’an 31 que Jésus entreprendra pour de bon son ministère galiléen : « Après que Jean eut été livré. » (Mc 1, 14). 

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