Retour au plan : PLAN
Or, il était entré un jour de sabbat chez l’un des notables Pharisiens pour y prendre son repas, et eux l’observaient. Justement un hydropique se trouvait devant lui. Prenant la parole, Jésus dit aux légistes et aux Pharisiens : « Est-il permis le sabbat de guérir, ou non ? » Et ils se tinrent cois. Il prit alors le malade, le guérit et le renvoya. Puis il leur dit : « Lequel d’entre vous, si son fils ou son bœuf vient à tomber dans un puits, ne l’en tirera aussitôt, le jour du sabbat ? » Et à cela ils furent incapables de rien répliquer. |
Ce récit de miracle rappelle par bien des points la guérison d’un homme à la main desséchée qu’on trouve dans Marc (3, 1-6), avec des parallèles dans Matthieu (12, 9-14) et dans Luc (6, 6-11). C’était notre épisode 43. La problématique est exactement la même : On observe Jésus pour voir s’il allait guérir le jour du sabbat, afin de pouvoir l’accuser. Et la dialectique employée par Jésus est similaire.
Les circonstances, cependant, restent différentes, et l’on ne peut les confondre. Le lieu est autre : chez l’un des notables Pharisiens dans le premier cas, une synagogue dans le second cas. La maladie n’est pas la même : un hydropique d’une part, un homme à la main sclérosée d’autre part.
Dans la synopse-synthèse, nous les considérons comme deux miracles tout à fait distincts. Pourtant Matthieu grec, quand il raconte le second miracle en parallèle avec Marc (notre épisode 43, donc), emploie un argument qu’il semble bien emprunter au premier, celui de la guérison de l’hydropique dans la source Q. Un argument, en effet, qu’on ne se trouve pas dans Marc. « Qui d’entre vous, s’il n’a qu’une brebis et qu’elle tombe dans un trou le jour du sabbat, n’ira la prendre et l’en retirer ? » (Mt 12, 11). Cela ressemble fort à « Lequel d’entre vous, si son fils ou son bœuf vient à tomber dans un puits, ne l’en tirera aussitôt, le jour du sabbat ? » (Lc 14, 5). Cependant, Jésus a pu prononcer à diverses reprises des paroles semblables, et d’autant plus un jour du sabbat.
« Et à cela ils furent incapables de rien répliquer.» (Lc 14, 6). Car ils étaient particulièrement obtus ! Ne pas pouvoir tenir tête à l’éloquence du Maître, passe encore. Mais assister à un miracle extraordinaire, irrécusable, instantané, pratiqué avec autorité, sous leurs yeux, même un jour de sabbat, sans en être émus, bouleversés, estomaqués, cela suppose un endurcissement moral assez exceptionnel, et de plus collectif.
Ces légistes ne pouvaient même pas crier à la supercherie, ou à la connivence ! Un hydropique qui revient à la normale, en un clin d’œil, cela ne peut se feindre. D’ailleurs, ils n’en ont même l’idée. Ils restent comme confondus, et claustrés dans leur système de pensée.