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223. Portement de croix. Le vendredi.

Matthieu 27, 32. Marc 15, 20b-22. Luc 23, 26-32. Jean 19, 16b-17.

Ils le conduisent dehors pour le crucifier. Ils prirent donc Jésus qui, portant lui-même sa croix, sortit de la ville pour aller au lieu-dit du Crâne, en hébreu Golgotha. Comme ils l’emmenaient, en sortant, ils trouvèrent un homme de Cyrène nommé Simon. Ils mirent la main sur un certain Simon de Cyrène. Ils requièrent pour porter sa croix Simon de Cyrène, le père d’Alexandre et de Rufus, qui revenait des champs, et ils le chargèrent de la croix pour la porter derrière Jésus.

Le peuple, en grande foule, le suivait, ainsi que des femmes qui se frappaient la poitrine et se lamentaient sur lui. Mais se retournant vers elles, Jésus dit : « Filles de Jérusalem, ne pleurez pas sur moi ! Pleurez plutôt sur vous-mêmes et sur vos enfants ! Car voici venir des jours où l’on dira : Heureuses les stériles, heureuses les entrailles qui n’ont pas enfanté et les seins qui n’ont pas nourri ! Alors on se mettra à dire aux montagnes : Tombez sur nous ! et aux collines : Couvrez-nous ! Car si l’on traite ainsi le bois vert, qu’en sera-t-il du bois sec ? » On conduisait encore avec lui deux autres malfaiteurs pour être exécutés. 

Et ils amènent Jésus au lieu-dit Golgotha, ce qui signifie : lieu du Crâne.

Episode 223. Commentaire.

Vendredi Saint 3 avril 33. Jour de la Rédemption du monde. 14 Nisan pour les juifs de Jérusalem. Parascève (cf. Jn 19, 42) de Pâque aussi bien que du sabbat. Le témoignage du Talmud de Babylone (Sanhédrin 43a) conforte la chronologie de l'évangile selon Jean puisqu'il y est rapporté que Jésus a été pendu au bois la veille de Pâque.

De bon matin on réveille les condamnés pour les conduire au supplice. On enlève à Jésus sa chlamyde rouge, qui a servi pour le carnaval, et on lui remet ses vêtements, ceux dont on le dépouillera sur le Calvaire. Et le cortège s’organise, sous la direction d’un centurion, l’exactor mortis. On verra au moment de l’exécution que les bourreaux qui se partagèrent les vêtements étaient au nombre de quatre (cf. Jn 19, 23). Mais sans doute un détachement de soldats devait être réquisitionné, pour prévenir tout incident. Un centurion pouvait commander jusqu’à cent hommes, comme son nom même l’indique.

La distance du palais d’Hérode au Golgotha, où devait avoir lieu l’exécution, n’était pas très grande, quelque trois ou quatre cents mètres. Mais il est probable que le défilé s’organisa à travers la ville, sans emprunter la route directe. Il était d’usage de donner une grande publicité aux exécutions capitales, afin d’intimider le peuple. De plus, aujourd’hui, c’était le Roi des Juifs qu’on allait crucifier. La foule des spectateurs serait nombreuse.

On est sans doute passé par la place très populeuse du Xyste, et devant le palais des Hasmonéens, où résidait Hérode Antipas, avant de rejoindre la porte d’Ephraïm et le rocher du Golgotha, où l’on devait exécuter les condamnés. Le défilé, très lent, avec tous les incidents du parcours, l’attroupement de la foule, a pu prendre deux heures.

Il n’est indiqué nulle part qu’on remit à Jésus la couronne d’épines, qui avait été confectionnée la veille, ou l’avant-veille, par dérision. On peut le présumer cependant, car Pilate écrira bien sur le panneau : Celui-ci est le Roi des Juifs. Un roi ne se conçoit qu’avec sa couronne. En tout cas, l’iconographie chrétienne aime ainsi représenter Jésus en croix, avec la couronne d’épines sur la tête.

« Ils le conduisent dehors pour le crucifier. » (Mc 15, 20b). Jean nous précise (19, 17) que Jésus portait lui-même sa croix, et qu’on se dirigeait vers lieu-dit du Crâne, en hébreu (ou plutôt en araméen) Golgotha.

On a discuté pour savoir si Jésus portait la croix entière, ou seulement la traverse, le patibulum. Il semble d’après les travaux du professeur André Marion sur le linceul de Turin et la tunique d’Argenteuil (reliques présumées authentiques de la Passion) que le Christ portait bien la croix entière, comme le suggère d’ailleurs saint Jean. On avait choisi probablement la crux sublimis, la croix haute, car il faudra tendre une éponge au bout d’un roseau pour donner à boire au Christ en croix, et comme le confirme aussi l’orientation du coup de lance, qui sera donné de bas en haut. Elle devait bien peser quelque cent kilos. Aussi Jésus, épuisé, ne pourra pas la porter seul jusqu’au bout.

« En sortant » nous dit Matthieu (27, 32), sans doute en sortant du palais d’Hérode, on réquisitionne, d’après les trois synoptiques, un certain Simon de Cyrène pour aider Jésus à porter sa croix, c’est-à-dire qu’on le place derrière lui. Il revenait des champs, notent Marc (15, 21) et Luc (23, 26). C’est-à-dire qu’il avait passé plusieurs jours à la campagne, et il revenait en ville, dans cette matinée de Parascève, pour préparer l’agneau pascal avec sa famille. C’était le père d’Alexandre et de Rufus, nous dit Marc (15, 21) ; des personnages sans doute connus de la première communauté chrétienne. On sait qu’on a trouvé à Jérusalem, en 1941, l’ossuaire de cet Alexandre, fils de Simon de Cyrène. Tout cela démontre le profond ancrage dans l’histoire de l’évangile de Marc.

Luc seul (23, 27-31) nous apprend que le peuple en grande foule suivait Jésus, et que les femmes de Jérusalem se lamentaient sur lui. Jésus trouve le temps de leur adresser un sermon édifiant. « Filles de Jérusalem, ne pleuraient pas sur moi ! » (Lc 27, 28). Pleurez plutôt sur vous-mêmes et sur vos enfants, car des jours terribles fondront sur cette ville. On dira : Heureuses les femmes stériles ! On suppliera les montagnes de tomber sur nous pour échapper à cette angoisse. « Car si l’on traite ainsi le bois vert, qu’adviendra-t-il du bois sec ? » (Lc 23, 31). Petitfils (page 373) nous apprend qu’il existait effectivement à Jérusalem une confrérie de pleureuses, chargées d’accompagner les condamnés à mort, en poussant des cris de douleur.

Luc ajoute (23, 32) qu’on emmenait avec lui deux autres malfaiteurs.

Marc conclut : « Et ils amènent Jésus au lieu-dit Golgotha, ce qui signifie : lieu du Crâne. » (Mc 15, 22). Situé dans une ancienne carrière de pierres, en dehors de la ville, c’était une butte rocheuse d’environ 5 mètres de haut. Elle était longée par la route très passante qui conduisait à Joppé (Jaffa), sur la côte.

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