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Puis il dit à ses disciples : « Voilà pourquoi je vous dis : Ne vous inquiétez pas pour votre vie de ce que vous mangerez, ni pour votre corps de quoi vous le vêtirez. La vie n’est-elle pas plus que la nourriture et le corps plus que le vêtement ? Regardez les corbeaux, voyez les oiseaux du ciel : ils ne sèment ni ne moissonnent ni ne recueillent en des greniers ; ils n’ont ni celliers ni greniers et votre Père céleste, Dieu, les nourrit ! Ne valez-vous pas plus qu’eux ? Combien plus valez-vous que les oiseaux ! « Qui d’entre vous d’ailleurs peut, en s’en inquiétant, ajouter une seule coudée à la longueur de sa vie ? Si donc les plus petites choses mêmes passent votre pouvoir, pourquoi vous inquiéter des autres ? « Et du vêtement pourquoi vous inquiéter ? Observez, regardez les lis des champs comme ils poussent : ils ne peinent ni ne filent ni ne tissent. Or, je vous le dis, Salomon lui-même, dans toute sa gloire, n’a pas été vêtu comme l’un d’eux. Que si, dans les champs, Dieu revêt de la sorte l’herbe des champs, qui est aujourd’hui et demain sera jetée au four, combien plus fera-t-il pour vous, ne fera-t-il pas bien plus pour vous, gens de peu de foi ! Ne cherchez donc pas, vous non plus, ce que vous mangerez ou boirez. Ne vous inquiétez donc pas en disant : Qu’allons-nous manger ? qu’allons-nous boire ? de quoi allons-nous nous vêtir ? Ne vous en tourmentez pas. Car ce sont là toutes choses dont les païens de ce monde sont en quête. Mais votre Père céleste sait que vous avez besoin de tout cela. Aussi bien, cherchez d’abord le Royaume et sa justice, et tout cela vous sera donné par surcroît. « Ne vous inquiétez donc pas du lendemain : demain s’inquiétera de lui-même. A chaque jour suffit sa peine. « Sois sans crainte, petit troupeau, car il a plu à votre Père de vous donner le Royaume. » |
Jésus ne semble plus s’adresser à la foule, mais à ses disciples seuls. Apparemment, dans la source Q, toutes les péricopes, depuis la parabole de la lampe (épisode 119), s’enchaînent comme si elles se passaient dans la même journée : « Sur ces mots un Pharisien… » (Lc 11, 37, épisode 120). « Un légiste prit alors la parole… » (Lc 11, 45, épisode 120, suite). « Sur ces entrefaites, la foule… » (Lc 12, 1, épisode 121). « Quelqu’un de la foule… » Lc 12, 13, épisode 122). « Puis il dit à ses disciples… » (Lc 12, 22, épisode actuel 123).
De nouveau on retrouve Matthieu grec en parallèle de la source Q. Il a utilisé cette portion (Mt 6, 25-34) dans son Sermon sur la montagne. Il en a fait un élément de la cinquième section (Mt 6, 19-34) qu’on a intitulée : détachement des richesses, avec le vrai trésor, l’œil lampe du corps, la maxime sur Dieu et l’argent.
Matthieu grec démarque la source Q presque textuellement. Il ne modifie que quelques termes. Il remplace les corbeaux de Luc par une expression plus générique : les oiseaux du ciel. Il met ‘votre Père céleste’ à la place de ‘Dieu’. Il complète ‘Royaume’ par ‘Royaume et sa justice’.
Il donne cependant une conclusion différente, quoique de sens voisin. Luc écrit : « Sois sans crainte petit troupeau, car il a plu à votre Père de vous donner le Royaume. » (Lc 12, 32). Matthieu grec met à la place ces maximes : « Ne vous inquiétez donc pas du lendemain : demain s’inquiétera de lui-même. A chaque jour suffit sa peine. » (Mt 6, 34).
Malgré ces corrections limitées, on voit que l’auteur de notre premier évangile se sert d’une version grecque de l’araméen original très proche de celle de Luc. Pas étonnant : car c’est lui-même qui l’a rédigée dans les deux cas. Le diacre Philippe a traduit une première fois l’araméen à l’intention de Luc, puis la deuxième fois il a reproduit la page dans son Sermon sur la montagne.
Le chrétien doit vivre dans l’action de grâce et ne se préoccuper de rien. Il ne faut chercher que le Royaume. « Et sa justice » précise Matthieu (6, 33), c’est-à-dire la sainteté. La sainteté en ce monde et l’éternité dans l’autre.